Article N° 8182
Québec - Polymédication
Québec : la moitié des personnes âgées exposées à des médicaments potentiellement inappropriés
Abderrahim Derraji - 07 septembre 2025 18:42Une récente étude menée au Québec révèle qu’une proportion importante d’aînés consomme des médicaments potentiellement inappropriés, c’est-à-dire dont les risques peuvent parfois surpasser les bénéfices. Les chercheurs ont analysé en 2022 les données de plus de 1,2 million de personnes âgées de 65 ans et plus, et les résultats sont préoccupants. Des centaines de milliers de personnes âgées prennent au moins un de ces médicaments, parmi lesquels figurent notamment les somnifères.
Selon Alexandre Campeau Calfat, étudiant-chercheur et coauteur de l’étude publiée dans Sage Journals, plus le nombre de médicaments utilisés est élevé, plus le risque de recourir à une thérapie inappropriée augmente. En effet, 20 % des personnes âgées de 66 ans et plus consomment plus de huit médicaments quotidiennement, et près de 90 % de ce groupe sont exposées à au moins un traitement potentiellement inapproprié.
Les effets de ces médicaments peuvent évoluer avec l’âge. Un médicament dont le rapport bénéfices-risques est favorable peut, au fil du temps, présenter un danger pour le patient. Certains traitements, par exemple, peuvent être à l’origine de troubles cognitifs. Ces effets secondaires insidieux sont parfois attribués, à tort, au vieillissement naturel plutôt qu’à la médication.
L’étude ne s’est pas penchée sur les causes directes de ces dysfonctionnements, mais Campeau Calfat souligne une tendance générale à l’augmentation de la consommation de médicaments au Québec, notamment chez les patients atteints de maladies chroniques comme le diabète ou l’hypertension. Généralement, les professionnels de santé savent mettre fin à des traitements susceptibles de provoquer des interactions ou présentant des effets indésirables, mais ces mêmes professionnels maintiennent souvent des prescriptions anciennes, restées inchangées depuis des années, voire des décennies, ce qui peut être dangereux pour le malade.
Le problème ne se limite pas au Québec. La polymédication et la pertinence des traitements sont également des enjeux dans plusieurs provinces canadiennes. Pour Campeau Calfat, il est crucial de sensibiliser à la fois les professionnels de santé et le grand public. Il suggère qu’une prescription de huit médicaments ou plus devrait systématiquement susciter une réévaluation.
Heureusement, les pharmaciens disposent désormais du pouvoir de déprescrire certains médicaments jugés inappropriés. Cette évolution leur confère un rôle clé dans la révision des traitements, en complément des médecins. Les chercheurs poursuivent d’ailleurs leurs travaux afin de mesurer les répercussions concrètes de la polymédication sur les hospitalisations, avec des résultats attendus dans les prochains mois.
Cette étude met en exergue un enjeu de santé publique majeur : la nécessité de revoir régulièrement les traitements médicamenteux des aînés pour garantir non seulement leur efficacité, mais aussi leur sécurité à long terme.
Source : ici.radio-canada.ca